Le Montmartre bohème

1603
vus
montmartre

Secrets de butte

À la 222ème marche de la rue Foyatier, nous voi­là arri­ver au som­met de la butte Montmartre. Autrefois maquis abri­tant des cabanes et des abris de for­tune, ce quar­tier du 18ème arron­dis­se­ment de Paris s’est méta­mor­pho­sé au fil des années. Aujourd’hui un des lieux tou­ris­tiques les pus visi­tés de la capi­tale, Montmartre cache une his­toire emprunte de volup­té qui tente de sur­vivre dans les petites rues sinueuses de la butte.

 

Montmartre devrait son nom au mar­tyr Saint Denis, qui aurait sur­vé­cut à son exé­cu­tion sur la col­line : alors bap­ti­sée le mont des mar­tyrs. Après la Révolution fran­çaise, le quar­tier fut cou­pé en deux et Paris annexa le Bas-Montmartre dans l’actuel 9ème arron­dis­se­ment. Le Haut-Montmartre, quant à lui, se trans­for­ma en com­mune déli­mi­tée par la com­mune de Saint Ouen au nord, le che­min des Poissonniers à l’est, le mur des Fermiers géné­raux au sud et la com­mune de Clichy à l’ouest.

montmartre
Les mou­lins de la Butte Montmartre

Avant que la com­mune de Montmartre ne devienne le 18ème arron­dis­se­ment de Paris en 1860, la butte abri­tait des car­rières de plâtre sou­ter­raines, des mou­lins à blé dans les airs et des fer­railleurs, des chif­fon­niers, des voleurs ou des voyous dans le maquis. La vie y était pai­sible comme dans un vil­lage. De nom­breux artistes vinrent s’inspirer de cette ambiance mêlant la fête et la nature per­çante, comme Utrillo, Renoir, Van Gogh ou encore Lautrec. Le jour, on se pava­nait dans les petits bis­tro­quets et la nuit, on s’imprégner de la musique des cabarets.

montlartre
Le déjeu­ner des cano­tiers de Renoir
montmartre
Place des Abbesses d’Utrillo

Le Baron Haussmann entre­prit de grands tra­vaux dans la capi­tale pour évi­ter les embou­teillages aux alen­tours du bois de Boulogne. Les loyers s’enflammèrent, obli­geant les Parisiens les plus pauvres à par­tir du centre de Paris pour trou­ver refuge à Montmartre. En 1860, la com­mune de Montmartre est offi­ciel­le­ment annexée à Paris deve­nant le 18ème arron­dis­se­ment. Les car­rières, mena­çant la butte de s’effondrer, sont fer­mées et les mou­lins, vic­times de l’industrialisation, mettent la clé sous la porte les uns après les autres. Seul le célèbre Moulin de la Galette per­dure grâce à ses bals et sa trans­for­ma­tion en guinguette.

montmartre
Le Moulin de la Galette au des­sus du maquis de Montmartre

La Commune de Paris se déclenche à Montmartre en 1871, là où les canons de la Garde Nationale sont sta­tion­nés. Révolutionnaires et soli­daires, les Montmartrois s’insurgent contre le gou­ver­ne­ment, en par­tie en rai­son de la défaite face aux Prussiens. La construc­tion de la Basilique du Sacré-Cœur est étroi­te­ment liée à cet évé­ne­ment his­to­rique. On trouve, dans des docu­ments offi­ciels et des ouvrages uni­ver­si­taires, la thèse selon laquelle elle aurait été construite pour « expier les crimes des com­mu­nards », mais du côté des maqui­sards elle est reçue comme une insulte à leur esprit révolutionnaire.

montmartre
Des maqui­sards lors de la Commune de Paris en 1871
montmartre
Construction de la Basilique du Sacré-Coeur

Au début du XXème siècle, le maquis change tota­le­ment de look. Des pro­mo­teurs rachètent et volent des ter­rains aux maqui­sards pour y construire des vil­las de luxe et des immeubles style Art Déco. En 1909, l’ave­nue Junot com­mence à sor­tir de terre, détrui­sant petit à petit toutes les cabanes du maquis. Mais Montmartre vit encore aujourd’hui dans cette atmo­sphère unique de vil­lage pari­sien où de magni­fiques gly­cines poussent aux fenêtres et où l’histoire refait sur­face à chaque coin de rue. Au lapin agile de la rue des Saules, Picasso, Dorgelès ou Carco rêvaient de refaire le monde entre une absinthe et un french cancan.

montmartre
Construction de l’a­ve­nue Junot
montmartre
Au Lapin Agile