Secrets de butte
À la 222ème marche de la rue Foyatier, nous voilà arriver au sommet de la butte Montmartre. Autrefois maquis abritant des cabanes et des abris de fortune, ce quartier du 18ème arrondissement de Paris s’est métamorphosé au fil des années. Aujourd’hui un des lieux touristiques les pus visités de la capitale, Montmartre cache une histoire emprunte de volupté qui tente de survivre dans les petites rues sinueuses de la butte.
Montmartre devrait son nom au martyr Saint Denis, qui aurait survécut à son exécution sur la colline : alors baptisée le mont des martyrs. Après la Révolution française, le quartier fut coupé en deux et Paris annexa le Bas-Montmartre dans l’actuel 9ème arrondissement. Le Haut-Montmartre, quant à lui, se transforma en commune délimitée par la commune de Saint Ouen au nord, le chemin des Poissonniers à l’est, le mur des Fermiers généraux au sud et la commune de Clichy à l’ouest.
Avant que la commune de Montmartre ne devienne le 18ème arrondissement de Paris en 1860, la butte abritait des carrières de plâtre souterraines, des moulins à blé dans les airs et des ferrailleurs, des chiffonniers, des voleurs ou des voyous dans le maquis. La vie y était paisible comme dans un village. De nombreux artistes vinrent s’inspirer de cette ambiance mêlant la fête et la nature perçante, comme Utrillo, Renoir, Van Gogh ou encore Lautrec. Le jour, on se pavanait dans les petits bistroquets et la nuit, on s’imprégner de la musique des cabarets.
Le Baron Haussmann entreprit de grands travaux dans la capitale pour éviter les embouteillages aux alentours du bois de Boulogne. Les loyers s’enflammèrent, obligeant les Parisiens les plus pauvres à partir du centre de Paris pour trouver refuge à Montmartre. En 1860, la commune de Montmartre est officiellement annexée à Paris devenant le 18ème arrondissement. Les carrières, menaçant la butte de s’effondrer, sont fermées et les moulins, victimes de l’industrialisation, mettent la clé sous la porte les uns après les autres. Seul le célèbre Moulin de la Galette perdure grâce à ses bals et sa transformation en guinguette.
La Commune de Paris se déclenche à Montmartre en 1871, là où les canons de la Garde Nationale sont stationnés. Révolutionnaires et solidaires, les Montmartrois s’insurgent contre le gouvernement, en partie en raison de la défaite face aux Prussiens. La construction de la Basilique du Sacré-Cœur est étroitement liée à cet événement historique. On trouve, dans des documents officiels et des ouvrages universitaires, la thèse selon laquelle elle aurait été construite pour « expier les crimes des communards », mais du côté des maquisards elle est reçue comme une insulte à leur esprit révolutionnaire.
Au début du XXème siècle, le maquis change totalement de look. Des promoteurs rachètent et volent des terrains aux maquisards pour y construire des villas de luxe et des immeubles style Art Déco. En 1909, l’avenue Junot commence à sortir de terre, détruisant petit à petit toutes les cabanes du maquis. Mais Montmartre vit encore aujourd’hui dans cette atmosphère unique de village parisien où de magnifiques glycines poussent aux fenêtres et où l’histoire refait surface à chaque coin de rue. Au lapin agile de la rue des Saules, Picasso, Dorgelès ou Carco rêvaient de refaire le monde entre une absinthe et un french cancan.
La culture, un Paris d’enfants